Camille Pin : Une niçoise qui en veut ..
Posté par aucomptoirdesports le 24 novembre 2010
Camille Pin est une ex joueuse de tennis qui a passé une dizaine d’années dans le top 100 mondial. Après avoir mis un terme à sa carrière en mai 2010, cette toute jeune retraitée (29 ans) n’en demeure pas moins très active en dehors des courts. Avec elle, nous revenons sur son parcours et le tennis français en général.
Est ce que ça te manque ?
Bizarrement pas du tout ! Même quand je vois les autres jouer alors qu’avant la compétition était mon moteur. Mais, j’ai tellement donné physiquement et mentalement pendant 15 ans que j’ai envie de décompresser.
Qu’est ce qui t’a amené au tennis ?
J’ai eu la chance d’avoir une famille qui jouait énormément en loisir. A 5 ans, j’avais déjà une raquette dans la main. Et je suis entré en club à l’âge de 8 ans et ça s’est enchaîné très vite puisqu’à 12 ans j’étais déjà en équipe de France.
Tu savais déjà que tu voulais être professionnelle ?
Ah non ! Moi ce qui m’importait c’était de faire ma carrière et d’évoluer sereinement en marge avec une structure privée.
Justement peux tu nous parler du Lagardère Paris Racing ?
Quand ils m’ont présenté leur projet, je n’ai pas hésité une seconde. En arrivant sur Paris, j’ai découvert une structure très pro avec des méthodes très poussées. Par exemple, on subissait des tests salivaires pour mesurer notre taux de fatigue et notre capacité à encaisser certaines séances. Et puis nous étions mélangés avec des athlètes d’autres sports. Il y régnait vraiment une ambiance extraordinaire. L’expérience s’est arrêtée récemment. Pour ma part, je pense qu’ils ont donné trop de moyens sur une courte période. Là on passe de tout à rien et c’est dommage. Mais Lagardère est toujours présent dans le management.
Combien de coachs ont compté dans ta carrière ?
J’ai toujours ressenti le besoin de sentir que l’on croyait en moi d’où l’importance de la structure privée. De 5 à 17 ans je suis restée à Nice avec le même entraîneur mais il n’a pas pu me suivre lorsque j’ai commencé à faire quelques grands déplacements. Et c’est Eric Brémont qui a pris la relève. Je suis resté avec lui pendant 8 ans au cours desquels je suis passé de la 500è place à la 60è. Et j’ai rejoint le Lagardère Paris Racing pour les 3 dernières années de ma carrière.
Que t’a apporté Eric Brémont ?
Bien sûr, il m’a fait passé des caps techniquement mais il m’a aussi apporté plus de précision dans ce que je faisais, privilégier la qualité à la quantité. A 17 ans j’étais motivée et je voulais en faire des tonnes mais je travaillais mal. En ce sens il m’a fait comprendre qu’il valait mieux parfois une journée de repos à 5H de travail non stop. Et puis on a partagé pas mal de moments difficiles…
Quels sont les pires souvenirs de ta carrière ?
Comme dans la vie, il y a beaucoup de bas parce que tu as beau faire un super match la veille, mais si le lendemain tu te rates, cela suffit pour perdre confiance. C’est la particularité du tennis. On joue toutes les semaines et il est par conséquent impossible de gagner tout le temps. Il faut savoir gérer l’échec. Ces moments sont difficiles parce qu’on est seul, on est loin…
Ton coach ne te suivait pas ?
Non, pas tout le temps car déjà cela coûte très cher et en plus il avait une autre joueuse en charge donc on se le partageait. Il arrivait donc que je fasse une tournée US de 4 semaines pendant qu’elle était en Europe donc il ne pouvait pas nous suivre.
Pas évident de trouver la motivation dans ces moments là ?
Je ne parlerai pas de motivation car on a toujours envie ! Mais j’insisterai plus sur le fait d’aider à tenir dans la difficulté du moment. Ce qui est dur c’est de s’impliquer totalement physiquement, mentalement et financièrement et de voir qu’il n’y a pas de résultats. Tu fais des sacrifices en passant à côté de moments importants avec tes proches. C’est là que c’est dur.
Avec le recul, tu ne te dis pas que tu aurais été meilleure si tu avais fait d’autres choix ?
Bien sûr, mais c’est l’autre particularité du tennis. Que je m’entraîne avec X ou Y, au final c’est moi qui décide de me rendre sur tel ou tel tournoi. Valait il mieux que je me repose quitte à perdre les points acquis sur un tournoi ou que j’aille les défendre coûte que coûte ? C’est donc une prise de tête permanente.
Tu comptes des sélections en Fed Cup ?
Non, c’est l’un des immense regrets de ma carrière mais je suis tombé dans une période où le tennis féminin français était au top. Pourtant, j’étais prête. Je rêvais pourtant de porter le survêtement de l’équipe de France même pour m’asseoir sur le banc… Pareil pour les Jeux de Pékin où je suis dans la forme de ma vie et où Golovin tergiverse longtemps avant de déclarer forfait. Trop tard pour que l’on me donne ma chance… Je ne comprends pourquoi les joueurs se posent tant de questions quant à leur participation à cet évènement planétaire qui réunit toutes les disciplines une fois tous les 4 ans.Alors qu’un grand chelem, c’est tous les ans. Mais c’est parce que j’ai été très proche d’y aller que c’est si difficile à accepter. Mais j’aurai mérité de participer à ces deux aventures.
Tu as quand même vécu de bons moments ?
Toute la période où j’étais dans le top 60 ( 2007-2008) et où je jouais le tableau final de chaque grand tournoi et où j’affrontais des joueuses du top 10. Dans ces moments, tout prend un sens et tu te dis que ça valait le coup d’en baver car tu n’es pas arrivée là du jour au lendemain. C’était une revanche par rapport à tous les gens qui ne croyaient pas en moi.
Et puis il y a eu ce fameux match contre Sharapova (Melbourne 2007, menée 5-0 dans le dernier set, elle s’incline finalement 9-7)
Oui effectivement, je pensais que j’allai avoir peur de jouer sur ce gros court mais ce fut vraiment fabuleux. Et dans ce match, il y a tout eu, suspense, ambiance de folie, chaleur étouffante (41°C). Cela a duré plus de 3H. J’aurai aimé gagné mais je suis tellement allé au bout de moi-même que je n’ai pas de regrets.
Qu’est ce que tu réponds aux gens qui disent que le niveau du tennis féminin français est vraiment faible ?
Je suis plutôt d’un naturel optimiste mais c’est vrai que là, on observe une certaine désertion chez les jeunes. Avant, il y avait au moins 2 ou 3 filles qui dominaient leur catégorie d’âge, aujourd’hui, c’est un peu plus problématique. Quand j’étais n°60 à la WTA, je n’étais que la 8è française… Aujourd’hui la donne est différente. Est ce que c’est lié à un problème de formation ? Difficile pour moi de répondre à cette question dans la mesure où je suis dans le circuit pro depuis longtemps. En revanche, je pense que c’est tout simplement un phénomène de société.
Ton expérience de capitaine du L.P.R (Lagardère Paris Racing) aux interclubs te donne t’elle des envies de coaching ?
Pas du tout !! Être capitaine est une belle expérience. J’essaie de booster, rassurer les filles comme N.Tauziat l’avait fait avec moi avant. Mais aujourd’hui, ma priorité c’est ma reconversion professionnelle liée marketing sportif. Je vais commencer un Master à l’ESSEC en alternance avec Lacoste (mon équipementier depuis plus de 10 ans). A part ça, je suis consultante pour Canal plus, j’ai réalisé quelques plateaux pour InfoSport et je réaliserai quelques chroniques pour L’Equipe.
Depuis ta retraite de sportive, tu n’as donc pas eu de temps mort ?
Non, mais je m’en suis donné les moyens ! Ma carrière m’a montré que rien ne tombait du ciel et qu’il fallait s’impliquer pour aller de l’avant.
Un petit mot de la consultante sur la finale de la coupe Davis
Je suis très sceptique car ayant joué dans les pays de l’Est, je sais que l’atmosphère peut y être particulièrement détestable. Et les français aiment bien jouer avec le public mais quand il est positif. Le côté psychologique sera très important. Avec G.Monfils, c’est du quitte ou double. Je m’en fais moins pour Mika qui m’a l’air d’avoir plus de recul et de maturité pour gérer ce type d’évènements.
Un grand merci à Camille Pin pour cet entretien
Pour le plaisir petite vidéo de Melbourne où elle a failli faire craquer Sharapova
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