Pierre-Jean Vazel, un coach moins atypique qu’il n’y paraît
Posté par aucomptoirdesports le 18 décembre 2008
Comme beaucoup, j’ai fait la connaissance de PJV dans les journaux au moment où Ronald Pognon fort de ses 9’99 a quitté son désormais ex coach Guy Ontanon après 3 années de collaboration. La séparation a fait grand bruit. A l’époque dès que l’on parlait de ce jeune coach c’était « étudiant aux beaux arts, fou de statistiques » (l’Equipe ), « coach autodidacte » (l’Express), « pigiste de l’I.A.A.F », « entraîneur à distance d’Olusoji Fasuba (9 ’85 recordman d’Afrique), ou encore « ni entraîneur ni diplômé ni cadre d’état » (Franck Chevallier sur eurosport). Cela m’a vraiment donné l’impression que le bonhomme était sorti d’un kinder surprise pour ces athlètes. Et comme beaucoup je me suis posé la question , mais pourquoi ?
Aussi quand il m’a été donné la possibilité de faire plus ample connaissance, j’ai sauté sur l’occasion. La rencontre s’est déroulée au stade d’athlétisme de l’ES Montgeron où il entraîne mardi, mercredi et vendredi …. les jeunes de l’école d’athlé. Etonnant non ?
Après les bonsoir de courtoisie, ma première question a été « alors parmi ces jeunes pousses est ce qu’il y en a qui sont intéressants ? ( sous-entendu prometteurs)» , il m’a répondu avec un sourire « ils sont tous intéressants ! ». Voilà qui en dit déjà un peu plus sur sa personnalité. Avant de s’intéresser à ses méthodes d’entraînement, son travail avec Ronald, et ses perspectives, impossible d’occulter Olusoji Fasuba avec qui il est arrivé à 9″85.
La collaboration avec « Olu »
Pierre-Jean Vazel, ancien athlète de 110 M haies ( niveau national 3) est un jeune pigiste pour l’IAAF qui écume tous les meetings européens. Ainsi, il côtoie de nombreux entraîneurs et athlètes. Lorsqu’il rencontre Olu, 19 ans, jeune sprinteur en devenir, celui-ci est à la recherche d’un entraîneur. Personne ne veut s’occuper de cet athlète africain car beaucoup savent que cela va être compliqué avec la fédération nigerianne en terme d’intendance et d’incompétence. PJV, passionné d’athlé et de statistiques, a accumulé et stocké des tas de plan d’entraînements et de courses et démarre donc sa collaboration avec Olu.
Une collaboration qui n’a pas été de tout repos puisqu’ils ont fait face à de nombreuses contraintes. C’est d’ailleurs là qu’a débuté l’entraînement à distance. Cela ne les a pas empêché de se côtoyer longuement lors des périodes de stage et de compétitions dans des conditions parfois précaires pour un athlète de haut niveau. Mais, c’est aussi dans ces moments qu’ils ont appris à mieux se connaître l’un l’autre provoquant une parfaite alchimie qui les a conduit 2 ans plus tard au fameux record d’Afrique 9″85.
Sa méthode
Pour PJV, « entraîner c’est avant tout les connaître pour mieux anticiper leurs besoins savoir quand ils ont soif, quand ils ne transpirent pas (mauvais signe), planifier, gérer le stress, savoir où se placer, parler quand il le faut ». PJV , en continuelle réflexion à la maison, assure ne pas parler technique avec ses athlètes car « il y a trop de mouvements réflexes et à partir du moment où la pensée s’invite dans le geste, c’est foutu !». De ce point de vue, avoir communiqué en anglais avec Olu lui a appris à être plus concis, plus bref dans ses consignes d’entraînement. C’est vrai qu’en tant qu’entraîneur on devrait plus souvent « Penser 7 fois, parler 1 fois ». D’autre part, il s’appuie sur les analyses rythmiques de Hess et les nombreux plans d’entraînement qu’il a accumulés. Son expérience au sein de l’IAAF lui a assurément servi quand il s’est agi de logistique (transports, hôtel…) et la planification des compétitions pour ses nouveaux athlètes dont Ronald Pognon.
Concernant Ronald
Cela va faire 3 ans maintenant que les 2 jeunes gens évoluent ensemble et une confiance mutuelle semble s’être installée. Et c’est là un élément primordial dans la quête d’un objectif. Ainsi, l’an passé tous 2 savaient que la saison en salle n’était qu’un passage obligé et non un objectif pour se qualifié aux J.O. A ce moment là, beaucoup doutaient des performances moyennes de Ronald. On se demandait où était passé le 1er sprinter passé sous les 10″. Et il a fallu une bonne dose de mental pour l’athlète et de psychologie pour l’entraîneur, pour traverser cette période hivernale. C’est là qu’ils ont pu constater que peu de personnes ne croyaient en eux. C’est ce qui fait dire à Ronald que « Montgeron est sa famille ». Il se sent très bien dans ce club grâce à la présidente A. Tournier Lasserve qui l’a largement soutenu cette période. Celle-ci était confiante quand ses 2 protégés lui ont affirmé qu’il seraient dans les temps l’été suivant. Contrat réussi : 10″10 . PJV assure que son protégé aurait très bien pu succomber aux sirènes sonnantes et trébuchantes d’autres groupes d’entraînement mais il a préféré resté dans ce petit club familial. Le coach est d’ailleurs confiant quant à la suite de sa saison car désormais Ronald est largement en avance sur ses plans d’entraînements par rapport à la saison passée. Ronald est capable selon lui de répéter des performances sous la barrière des 10″.
Encore aujourd’hui, beaucoup de journalistes quand ils parlent de PJV le qualifient d’autodidacte, de « jeune coach qui s’abreuve de bouquins ». Mais n’est-ce pas là le propre de l’entraîneur de parfaire ses connaissances pour mieux en faire profiter ses athlètes. Tout le monde connaît Guy Ontanon, coach de Mbandjok, mais qui peut dire quel athlète il était ? Personne ne s’étonne plus de voir Ladji Doucouré effectuer des préparations physiques d’avant saison plus qu’originales (cyclisme de vitesse) sous la houlette de Renaud Longuèvre. Alors laissons « l’entraîneur » PJV travailler en paix et souhaitons lui un peu en avance une bonne année 2009 et surtout une bonne santé pour lui et ses athlètes.
ce qui me gêne un peu avec les entraîneurs d’athlétisme, c’est qu’ils font, il me semble, beaucoup d’entraînements au « feeling », au ressenti, au vécu.
Leur planification d’entraînement n’est que distance à parcourir, periode hivernal-été,fréquence d’entrainement, intensité. Ceci est la base de tout entraînement, ok , mais est-il possible d’avoir des resultats importants avec ce genre de méthode?
Le parrallèle avec la natation, où il s’agissait de faire le plus de kilos possible, était envisageable dans le passé, mais l’est-il encore maintenant, non, je ne le pense pas.
Les entraînements en natation sportive se sont rationalisés, se sont »scienfifisés », et on voit aujourd’hui les resultats obtenus par la natation française aux récents championnats d’europe!!
alors peut-être que l’arrivée et le developpement de nouveaux coachs PJV en athlé va permettre de faire avancer les choses, et permettre ainsi d’avoir à nouveau des résultats.
Alors, oui aux nouvelles méthodes, oui aux nouveaux coachs, mais non à l’entraînement « feeling » , au ressenti, à l’experience.
Même si cette derniére est imporatnte dans la carrière d’un entraîneur, chaque athlète est différent, perçoit les choses différement, et ce qui fonctionne avec 1 ne marche peut-être pas avec l’autre, c’est la remise en cause perpétuelle de l’entraîneur et de ses compétences qui est somme tout important, et peut-être que des jeunes entraîneurs comme PJV ou celui de Ladji Doucouré vont remettre en selle l’athlétisme français, mais il me semble vu de l’exterieur que le petit monde de l’athlé français soit un peu réticent à ses possibles changements, evolutions.
Néo, il serait judicieux que tu précises ta pensée sur les mots « feeling », « ressenti », « vécu » et « expérience ».
Dans l’attente de ta réponse, voici ma vision des choses.
Il me semble qu’un entraîneur d’athlète (voire entraîneur tout court !!!) ne prend pas la mesure de ses réelles fonctions sans ces mots que je résumerais par un seul terme : la réflexion.
En effet, que serait un entraîneur possédant les fiches d’entraînement des meilleurs athlètes du monde sans ce feeling qui va lui permettre de les adapter en fonction des capacités physiques et mentales du moment de ses coureurs.
Que serait un entraîneur sans son vécu d’athlète. Pour ma part, j’ai connu les méthodes d’entraînement que tu qualifies de méthodes « scientifisées ». Eh bien, ce vécu que tu décries tant m’a permis d’éviter de faire l’erreur d’appliquer ces méthodes sur mes athlètes afin qu’ils puissent connaître une carrière moins éphémère que la mienne.
Concernant le volume d’entraînement, je t’informe qu’Alain Bernard a nagé 2000 km l’année dernière soit une moyenne de 38km sur 52 semaines (avec des pointes à plus de 80km par semaine) pour gagner le titre olympique sur 100m et battre le record du monde avec un entraîneur qui doit avoir le même âge que Longuèvre, l’entraîneur de Ladji Doucourè. Comme quoi, ces bonnes vieilles méthodes restent au goût du jour.
Par ailleurs, c’est méconnaître la méthodologie de l’entrainement que d’imaginer que les séances des athlètes se résument à un simple travail en volume.
Mais en relisant la fin de ton commentaire, il me semble que nous tombons finalement d’accord lorsque tu soulignes « le remise en cause perpétuelle de l’entraîneur et de ses compétences qui est en somme tout important » ; sans sensation, sans réflexion, bref sans ce feeling, l’entraîneur ne peut correctement être à la hauteur de ses ambitions.
Au plaisir de te lire.
P.S. : Pour information, connaitrais-tu l’âge de Maurice Houvion lorsque Jean Galfione est devenu champion olympique ainsi que celui de Clyde Hard, entraîneur de Michael Johnson et de Jérémy Wariner à l’époque de leurs titres de champion olympique…
merci didcau pour ces quelques eclairages !!
je ne connais pas assez l’athlétisme pour savoir quel est l’âge de tel ou tel entraîneur, mais je sais que le simple fait de « vomir » à la fin d’une séance, ne présage pas de la qualité d’un entraînement ou de son contenu.
ensuite, l’exemple des atlètes de haut niveau est-il pertinent dans l’élaboration des contenus d’entraînements? je ne le pense pas, comme toi d’ailleurs
ne pas reproduire ce que l’on a vecu, je connais aussi dans d’autres disciplines , et je comprends ce que tu dis, mais avec le recul, je me rends de plus en plus compte qu’ils n’avaient pas tous si tord que cela.
ensuite je ne suis pas pour le « tout » scientifique, je reconnais également le caractère emprique des compétences d’un coach, je dirais même plus que c’est ce qui fait la différence entre les coachs ,
je dis juste que l’apport de certaines technologies dans l’entraînement permet d’ameliorer les contenus, de les adapter aux athlétes, et par la même améliorer leur performance!!
en ce qui concerne Johnson et wariner, je me poserai toujours la question de savoir si ce sont des athlètes « propres », alors pour leur coach je t’avouerai franchement que cela ne m’interesse pas!!!
et pour bernard, je ne connaissais pas ces kilo à l’entraînement, et je ne connaîtrais jamais cela, peut-être parce que je ne suis ni athlète, ni nageur, ni cycliste, et que ce taux de kilo
me parait toujours trop important, mais c’est ce qui fonctionne, la preuve, et celui qui gagne est celui qui a raison, alors ok !! ils ont raison !!
au plaisir didcau,
à bientôt au comptoir, et bonnes fêtes
neo
Salut j’ai vu le reportage sur vous et sa ma epatée. j’ai une personne de ma famille qui est un peu comme vous. et OUAOUh c genial!
Morgane